what
we say
"Advertising’s breaking news problem".
C’est sous ce titre que le World Advertising Research Centre (WARC) vient de publier un gros rapport sur l’évolution globale des investissements publicitaires. Ce que l’organisme constate, c’est un glissement de la pub vers des environnements "UGC" : des contenus non professionnels, générés par les utilisateurs. Les médias sociaux en sont évidemment l’exemple le plus parlant.
Les chiffres publiés par le WARC font état d’un report assez sensible des investissements publicitaires vers ces contenus UGC : le rapport entre contenu "pro" et "amateur" passerait de 72-28% en 2019 à 51-49% en 2025. Oui, le contenu professionnel ne pèserait plus que la moitié de l’ensemble, pratiquement à parité avec les "User Generated Contents".
Premières victimes de ce changement : les médias d’information. Le "breaking news problem", c’est une aversion grandissante de certains annonceurs pour les contenus "hard news", au nom de la fameuse sécurité de leurs marques, la brand safety. Des "listes noires" de mots et de sujets réputés sensibles ont pour effet de bannir des contenus d’information, pas nécessairement joyeux, mais représentatifs de l’actualité. Une aversion pourtant délégitimée par plusieurs études sérieuses qui montrent pourtant que le "hard news", l’actualité usuelle, n’est pas nuisible à l’impact de la publicité, du moins dans les médias d’infos professionnelles.
En attendant, les revenus publicitaires obtenus via les déclinaisons digitales des médias d’info peinent à progresser. Selon les données de la World Association of News Publishers, la progression de leurs revenus publicitaires digitaux n’a été que de 3% par an ces trois dernières années, tandis que le chiffre d’affaires pub via leurs éditions papier était divisé par deux de 2018 à 2024.
Malgré cette chute, les éditions papier apporteraient cette année encore plus de 60% des revenus publicitaires des médias d’information dans le monde. Mais 60% d’un total en baisse régulière... La part limitée du digital dans les revenus publicitaires des "news media" est d’autant plus paradoxale que, selon le WARC, la consommation d’information passe aujourd’hui majoritairement par les plateformes digitales. Voilà pour la situation internationale.
Il est malheureusement difficile d’examiner ce qu’il en est de la Belgique sur ce plan. On remarque bien le recul en valeur de la publicité dans les journaux. Un recul plus important que celui des audiences de la presse quotidienne, qui d’ailleurs sont soutenues par la consommation de news sur écran. On est malheureusement incapable, faute de données, de suivre l’évolution des chiffres d’affaires publicitaires via les éditions digitales.
Il est toutefois peu probable que les médias d’info belges échappent à la tendance générale, celle d’une progression extrêmement lente des revenus digitaux. On peut même rappeler que selon le Benchmark UMA-UBA, le digital display est passé de 24 à moins de 15% du total digital entre 2022 et 2024. Or le digital display comprend vraisemblablement une bonne part de publicité sur les plateformes de nos newsbrands nationales.
Finalement, le passage des investissements publicitaires vers le contenu "non professionnel" n’est-il qu’une péripétie inévitable ? C’est ici que le WARC avertit : « Le déclin de l’investissement en faveur du journalisme professionnel risque [de provoquer] une baisse de la conscience civique et l’affaiblissement des défenses envers la désinformation ». Bref, le cercle vertueux qui voyait l’argent de la pub financer une bonne part de l’information indépendante et professionnelle est donc en train de se gripper. Et c’est inquiétant, y compris pour les marques.